06 novembre 2012

Mon témoignage d'entrepreneur-salarié d'une Coopérative d'Activités et d'Emploi

En ce Mois de l'Economie Sociale et Solidaire, la Coopérative d'Activités et d'Emploi Port Parallèle dont je suis l'un des entrepreneurs salariés m'a demandé de témoigner dans sa dernière lettre d'information

GH : Pourquoi avez-vous choisi une structure comme la CAE pour développer votre activité économique Et plus particulièrement Port Parallèle ?
JJF : En tant que consultant en développement durable, j'ai fait avant tout un choix de cohérence : je souhaitais être entre accord entre les valeurs que je transmets et mon statut entrepreneurial. Etre ainsi un acteur de l'économie sociale et solidaire est également une fierté et même un acte militant. Par ailleurs la CAE me permet de vivre une aventure collective partagée même si je travaille seul. J'ai choisi Port Parallèle car elle a une taille humaine, son siège est proche de mon domicile et elle avait le développement durable dans ses secteurs privilégiés.

GH : Quels avantages trouvez-vous dans le statut d'entrepreneur salarié ?
JJF  : Tout d'abord clairement cela m'éxonère de nombreuses tâches de gestion qui ne me passionnent pas outre mesure pour un coût qui me paraît juste et solidaire. Ensuite ce statut m'apporte une crédibilité et une caution notamment quand on travaille comme moi avec la commande publique et notamment dans les réponses à des consultations de marchés publics. Enfin ce statut permet une certaine souplesse, j'ai ainsi pu tester la viabilité puis exercer mon nouveau métier de "maître-composteur" qui représente aujourd'hui la moitié de mon activité. Qui sait si ma nouvelle passion de l'apiculture pas ne va également se transformer en une troisième activité professionnelle à Port Parallèle ? ...  Enfin, la formation est une part importante de mes missions, comme je bénéficie du n° de formateur de PP mes formations sont éligibles pour leur financement dans le cadre de la formation continue (DIF par exemple)

GH : Cela fait maintenant plus de 2 ans que vous avez intégré la coopérative, comment envisagez-vous la continuité de votre activité entrepreneuriale ?
JJF  : Je n'ai jamais imaginé ma présence à Port Parallèle comme une étape ou un choix par défaut mais bien comme un statut pérenne et réfléchi. Adepte du "Small is beautiful" je peux travailler seul en indépendant dans des conditions administratives confortables. La seule évolution que j'imagine est celle du sociétariat. 

GH : Que diriez-vous à des porteurs de projets en recherche de statut ? Les inciteriez-vous à intégrer une CAE ? 
JJF  : Je conseille ce statut aux étudiants que je forme ! Pourquoi faire compliqué ou risqué quand on peut faire simple ? Ce statut permet de tester une activité sans coûts fixes sans parler de l'accompagnement et des formations qui peuvent être utiles à des entrepreneurs qui ont des idées et de l'enthousiasme mais pas toujours le "background" nécessaires au succés de l'aventure dans laquelle ils se lancent. Mais ce statut ne fait pas tout ... c'est un écrin, à chacun d'y amener sa perle ;-)
Propos recueillis par Ghislaine Hillion

23 septembre 2012

Somewhere m'a trompé

Pas facile de s'habiller en coton bio, qui plus est quand on est un homme, car l'offre est faible ...alors quand j'ai vu ce petit pull à la coupe sympa en coton bio et en promo sur le site de Somewhere je l'ai commandé derechef.
Lorsque je l'ai reçu j'ai été surpris de ne pas voir mentionné "coton bio" sur l'étiquette du produit ou sur une sur-étiquette pour valoriser cette matière comme c'est souvent le cas.

J'ai donc appelé Somewhere qui m'a rassuré en me disant "ce n'est pas marqué coton bio" mais c'en est - rassurez-vous" ... Mais je n'y peux rien, je n'ai pu me satisfaire de cette déclaration rassurante, j'ai donc demandé à l'opératrice de faire remonter ma quête de la composition originale en "coton bio". Bien m'en a pris puisque quelques jours après on me rappelle en me confirmant que mon doute était bien fondé, qu'on s'excuse et qu'on me propose soit de renvoyer le produit (avec une lettre d'explications car je l'ai déjà porté) soit de le garder en  m'offrant 10 points de fidélités.

Etant donné qu'on obtient 10 euros de réduction avec 300 points, on m'a donc proposé 33 centimes d'euros en réparation de cette publicité mensongère ou tromperie sur la marchandise. Et quid des autres clients à qui on a vendu une vessie pour une lanterne ? ...

16 septembre 2012

Projac condamné pour avoir pété un cable !



Fin juin je découvre cette publicité dans la revue Recyclage Récupération - chacun ses lectures ;-) Comment au 21ème siécle peut-on encore utiliser le corps de la femme ainsi dans une publicité ? Ringard sûrement, non responsable assurément !

L'occasion de tester le module de dépôt de plainte en ligne du Jury de Déontologie de la Publicité. En deux clics et trois mouvements je demande donc le 9 juillet à l'instance arbitrale de l'ARP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) de statuer sur le non respect de règles de déontologie que s'est donnée la profession (en l’occurrence celle de l'Image de la personne humaine*). En effet j'estime que cette publicité est dégradante pour la femme qui est utilisée comme un objet et porte donc atteinte à leur dignité.
J'ai reçu début septembre la décision du JDP qui a statué le 3 août que ma plainte était bien fondée en vertu du non respect des points 1-3 et 2-1 de la doctrine spécifique. Il n'y aucun lien entre l'objet de la publicité et la représentation de la femme, cette instrumentalisation du corps de la femme la réduit donc à la fonction d'objet. CQFD.
Mais force est de constater que ce type de condamnation de pure forme (une condamnation au "name and shame" comme disent les anglais) n'a pas dissuadé, depuis 3 ans que le JDP existe, les annonceurs et leur agences de telles pratiques.
Pour former de nombreux communicants, en poste ou en devenir, à la communication responsable je constate que la notion de greenwashing est désormais connue mais rarement réellement assimilée dans son exigence. Nous sommes par contre encore aux balbutiements de la compréhension de la responsabilité sociétale des messages.

L'Association pour une Communication Responsable, dont je suis adhérent, a plus que jamais du pain sur la planche pour acculturer et réformer notre secteur.


* Les règles déontologiques sont des limites qui encadrent la publicité, au delà des obligations légales. Ces règles fixent des limites précises pour les annonceurs désirant communiquer de manière responsable sur leurs produits.

15 août 2012

Une semaine chez des apiculteurs sans frontières

Je connaissais l’apiculture familiale au travers de la conduite des 4 ruches installées dans le jardin de ma résidence. J’ai suivi en juin dernier une formation d’une semaine à l’apiculture mais j’avais envie de découvrir le quotidien d’une exploitation apicole de plus grande envergure… C’est ainsi que je me retrouve en ce début du mois d’août en gare de Chalon-sur-Saone où Yves Rondelet et son épouse, apiculteurs m’attendent. 
Mes hôtes apiculteurs 
Dans les années 70 un beau-frère offre à Yves une ruche, … la passion lui vient rapidement car 4 ans plus tard il en a déjà 80 et se souvient de cette récolte légendaire de plus de 10 tonnes ! Il en fera une activité complémentaire à son métier de professeur d’histoire géographie (à la retraite aujourd’hui). 
Yves va tomber également sous le charme de l’Afrique …et de son apiculture. Après plus d’une quinzaine de voyages dans différents pays de l’ouest de ce continent il a soutenu en 1996 une thése de doctorat de géographie sur « Le miel de l’Afrique de l’Ouest ». 
C’est aussi en Afrique qu’il a rencontré Pascaline, princesse d’un ancien royaume, qui est devenue son épouse il y a quelques années. Braver les abeilles africaines (plus agressives que les européennes) est d’habitude l’apanage des hommes valeureux, parfois un rite initiatique mais cela n’arrête pas Pascaline. Ils partagent leur vie entre la France et le Burkina Fasso où ils conduisent des ruchers en Bourgogne autour de leur miellerie de Fragnes(71) et Bobo-Dioulasso. Yves est également engagé dans différentes associations faisant la promotion de l’apiculture dans les pays en développement, il est par exemple vice président d’Apiculteurs sans frontières et d’Apiflordev. 
Récolte « commando » 
Mais revenons à nos ruches bourguignonnes. La première après-midi fut une mise en condition champêtre : enruchement d’une colonie d’une ruchette et visite de différents rûchers pour confirmer que la récolte pouvait commencer. 
Le lendemain, finies les visites bucoliques, place au commando de récolte. Après avoir enfilé nos combinaisons et gants, direction le premier rucher. Après une courte période d’observation je trouve ma place dans le trio et chacun alterne enfumage, ouverture de la ruche, soufflage des abeilles et portage des hausses au camion. Nous enchaînons les ruchers et ramenons le premier jour près de 60 hausses. 
Au cours de ma semaine d’immersion j’aurai ainsi l’opportunité de visiter et récolter, dans un rayon d’une trentaine de kilomètres, les différents ruchers de mes hôtes dans lequels sont installées plus de 200 ruches. Yves développe une vision sur un aménagement apicole idéal pour ses protégées. En effet, la plupart de ses ruches sont situées sur des terrains dont il est propriétaire sur lesquels il plante depuis des années moult arbres et plantes mellifères afin d’améliorer la bio-diversité, d’augmenter et d’améliorer la nourriture potentielle de ses avettes. 
Après trois journées de récolte à ce rythme il nous faut penser à extraire le miel. Rendez-vous donc dans la miellerie où nous désoperculons les hausses d’un coup de lame expert et les plaçons dans l’extracteur. Les mains sont plus que collantes mais quel plaisir de se lécher les doigts de ce miel « toutes fleurs » avant de se laver les mains pour passer à la mise en pot. Même si le rythme est rapide, c’est un moment propice à la discussion, une sorte d’arbre à palabres : nous parlons d’apiculture bien sûr mais aussi de nos vies personnelles et de l’Afrique dans laquelle je voyage chaque soir en lisant une partie de la thèse d’Yves et en dégustant la cuisine de Pascaline (bissap, tô, …). 
La semaine est finie, j'emmène dans mes bagages différents pots de miel qui seront mes m adeleines de Proust jusqu'à peut-être une prochaine visite au printemps ?

03 juillet 2012

Ma médiathèque idéale dans Kaizen

Le magazine Kaizen revient sur mon expérience de compost collectif à Paris dans son n° 3 de juillet mais il m'a également demandé de lui proposer ma "Médiatèque idéale" à découvrir ci-dessous : 

Ecouter 
1 / Jean-Louis Murat - CHEYENNE AUTUMN 
Nous avons quelques points communs : auvergnat (d’importation pour moi), teigneux (mais je me soigne) et viscéralement « paysan ». Et un morceau qui m’habite : Déjà deux siècles …89 
2/ Téléphone – Crache ton venin De ma passion du rock et de Téléphone en particulier j’ai gardé l’énergie et la rebellion contre l’ordre établi ou la fatalité. « si tu laisses quelqu’un prendre en main ton destin, c’est la fin … ». 
Lire 
3/ Le Petit Prince 
La bible de l’agnostique que je suis. En fait je suis croyant, je crois en l’homme surtout quand il sait s’occuper aussi bien d’une rose, qu’il est capable d’apprivoiser un renard ou qu’il est sensible à la magie des couchers de soleil . « On ne voit bien qu’avec son cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux » … 
4/ Manuel de Transition – Rob Hopkins 
Comment concrétement réinveter l’économie de nos territoires pour qu’ils puissent devenir résilients face à la conjonction du dérèglement climatique (largement popularisé) et du pic pétrolier (moins connu et pourtant si important). Une méthode pragmatique basée sur l’intelligence collective et la joie de vivre. 

5/ L’Homme qui plantait des arbres - Giono et/ou le film d’animation éponyme 
Je l’ai beaucoup offert à des enfants comme un papa offre un train électrique pour se faire plaisir … Un peu déçu d’apprendre que l’histoire n’est pas vraie, ce qui n’enlève rien à sa beauté. J’ai depuis découvert la puissance immense de cet acte de planter un arbre pour aujourd’hui mais surtout pour demain. 
6/ Ecologica – André Gorz 
Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt, l’écologie politique est une remise en cause du système capitaliste, consumériste et productiviste. Ce recueil de textes permet d’appréhender l’essence de la réflexion et de la critique sociale de ce philosophe moderne.  
Regarder 
7/ Soleil Vert de Richard Fleischer 
Tout y est : nous sommes en 2021, dérèglement climatique, raréfaction des ressources, inégalités, émeutes de la faim … Espérons que ce long-métrage de science-fiction ne passera pas au rayon documentaire et qu’au soleil vert nous préférerons les légumes bio du jardin … 
8/ Ici Najac à vous la Terre de Jean-Henri Meunier
Un peu dingues mais tellement humains ces habitants de Najac qui résistent, comme un village de gaulois, à la sinistrose et à ce mode de vie qu’on veut nous imposer malgré nous. Comme eux, réveillons-nous et soyons fous ! 
9/ Le Syndrôme du Titanic de Nicolas Hulot 
Ce film n’a pas trouvé son public comme on dit pudiquement, tout comme son inspirateur ses militants dans la primaire écologiste ;-) Pourtant ce film est beau à pleurer dans le constat impitoyable qu’il fait de nos enjeux environnementaux, sociaux et économiques. Comme lui, « je ne suis pas né écologiste » … 
Kaizen magazine : Quel a été votre dernier, ou quel sera votre prochain petit pas pour tendre vers un monde plus harmonieux, plus équilibré ? 
Je reviens d’une formation en apiculture et repars cet été me former à la permaculture. Désapprendre, apprendre, ré-apprendre, c’est une piqûre d’humilité et d’ouverture d’esprit pour se mettre en mouvement vers une société en transition, résiliente, ré-inventée, plus harmonieuses et plus équilibrée … 

02 juillet 2012

Don't Warré, be happy-culteur !


Le compost est pour moi une boite de pandore … Après avoir initié un compost collectif au pied de mon immeuble à Paris il y a 4 ans, un jardin partagé a pris la suite logique du projet et enfin quelques ruches y ont été installées. Même si l’apiculteur qui conduit notre rucher m’initie progressivement à la pratique à chacune de ses visites, ces dernières sont trop peu fréquentes par rapport à mon appétit d’apprendre. Aussi ai-je décidé de m’inscrire à une formation d’une semaine d’initiation à l’apiculture.
C’est comme cela que je me retrouve en ce lundi de juin au lycée agro-environnemental de Tilloy les Mofflaines dans la banlieue d’Arras (62). Si le lycée est public, ma chambre d’internat est quelque peu monacale, peut-être un signe inconscient des religieux qui ont beaucoup œuvré et écrit sur l’apiculture* ;-) La cloche sonne et nous sommes accueillis par Sébastien, notre formateur. Il enseigne l’apiculture en formation continue et de façon plus générale la biologie dans ce lycée, il est bien entendu apiculteur amateur lui-même sans parler de sa participations aux activités du syndicat et du Groupement de Défense Sanitaire Apicole de la région.
Cette formation va pratiquement être du cours particulier puisque nous ne sommes que 6 stagiaires avec pour le moins des profils très différents, du néophyte complet aux amateurs plus ou moins éclairés et pratiquants qui ont déjà mis un peu la main à la … ruche mais souvent en étant accompagné. Ainsi Fanny est une future maraîchère bio qui souhaite compléter son activité d’un atelier rucher ; Lucien est un soudeur de métier et colombophile de passion, il vient d’acheter un terrain sur lequel traîne une ruche et comme il a lu que la propolis permettait de soigner naturellement les oiseaux … Olivier est employé d’une entreprise qui a installé des ruches sur son patrimoine et enfin Jean-Yves et Sophie enseignent dans le lycée agricole qui organise la formation. Jean-Yves a contracté le virus de cette passion au contact de Sébastien notre formateur notamment à l’occasion d’un voyage humanitaire apicole à Madagascar, Sophie a elle déjà 4 colonies à la maison. Notre objectif commun après cette semaine : pouvoir conduire un rucher en autonomie.
Jour 1 Notre formation alternera théorie chaque matin et pratique l’après-midi. Dés le premier matin on découvrira la biologie de base de nos nouvelles amies : anatomie, cycle évolutif, organisation de la colonie, différentes races, … Le rythme est soutenu, on en oublie la pause et c’est bien tard que nous allons déjeuner où la formation continue dans des discussions informelles et déjà passionnées. Bref, c’est peu dire que les stagiaires sont motivés ! Mais place à  la pratique, après avoir enfilé nos protections et embarqué le matériel, destination un verger où un rucher a été installé pour, au-delà de la récolte de miel, favoriser la pollinisation de ses arbres fruitiers. L’enfumoir allumé préviendra les abeilles que nous arrivons, on dit parfois également qu’il rassure l’apiculteur ;-) Voici enfin le moment magique de l’ouverture de la ruche. Quel envoûtement que le vrombissement de la colonie qui suit le jet de fumée blanche. Après quelques minutes, l’appréhension se maîtrise progressivement, enhardi j’enlève mes gants car comme tout bon jardinier qui veut sentir sa terre, ici toucher et délicatesse des gestes sont importants. Nous mettons des images sur la théorie du matin : de l’œuf au couvain, réserves de pollen et de miel, … Nous nous amusons à prendre en mains les faux bourdons parmi les abeilles. Comme un bon cavalier doit tomber mille fois, un apiculteur se fera piquer de nombreuses fois avant d’atteindre le Graal de saint Warré*. C’est fait, j’enlève le dard, la piqure est presque un baptême initiatique.
Jour 2 Ce matin mon doigt a un peu gonflé mais je suis fier de ma blessure de guerre qui prouve ma bravoure de la veille ;-) Le calendrier apicole est au programme de ce matin. Eh oui conduire un rucher n’est pas une sinécure, les abeilles domestiques demandent suivi et soins tout au long de l’année. Notre enthousiasme et notre curiosité ne sont pas émoussés. Les questions fusent, difficile pour le formateur de contenir toutes les demandes sur des points qu’il est prévu d’aborder dans les jours à venir. L’après-midi dans un autre rucher passe vite et pourtant nous avons ouvert une dizaine de ruches, analysé leur état (bourdonneuse, orpheline), cherché, parfois trouvé et marqué la reine, réintroduit des cellules royales , …  Nous sommes comblés de voir tous ces cas de figure. Pas de piqûre aujourd’hui mais je me suis brûlé le pouce sur l’enfumoir, le métier rentre ! Et comme hier déjà, ce soir je sens la fumée comme si j’avais passé ma journée devant un feu de bois. C’est bien fatigué et des images d’abeilles plein la tête que je vais tomber dans les bras non pas de Morphée mais d’Apis mellifera mellifera.
Jour 3 L’élevage de reines et les règles d’implantation du rucher sont au menu du matin. Nous visitons l’après-midi un nouveau rucher dont certaines ruches sont suspectées de pathologie. Le rapport de visite de la première ruche est parfait, du couvain en masse, du pollen à revendre (nous en récupérons d’ailleurs dans la trappe adhoc), du miel en stock et une grande activité dans laquelle nous repérons quand même la reine qui sera marquée. Les visites des 4 autres ruches déboucheront sur le constat de la présence d’un virus. Comme tout animal l’abeille peut aussi souffrir de maladies. Voici un beau cas d’école un peu en avance sur notre cours sanitaire. Les ruches malades vont être emmenées pour être mis en quarantaine afin d’éviter la contagion. Avec un peu de chance les avettes arriveront à combattre seules la maladie et surviveront car à ce jour point de médicament pour soigner ce mal. Au retour à la miellerie tout notre matériel sera désinfecté au chalumeau, à l’eau de javel, à l’alcool …
Jour 4 Une matinée de bon goût puisqu’il sera question des produits de la ruche. Pollen, gelée royale, propolis et bien évidemment miel. Après avoir abordé la constitution de ces produits, leur récolte, conditionnement et commercialisation nous dégusterons différents miels : du plus local produit sur le site de Tilloye aux plus lointains (un miel de litchie et un autre de framboisier en provenance de Madagascar), du plus solide (un miel de colza) au plus liquide en passant par un crémeux (du Queyras), quelle abnégation que celle de l’élève apiculteur ! L’après-midi se déroulera à la miellerie où nous découvrons le matériel de récolte et de conditionnement (bac de désoperculation, maturateur et extracteur). Comme tous les greniers, celui de la miellerie ne manque pas de ressources. Après avoir passé en revue les nombreux modèles de ruches existant (Dadant, Warré, Langstroth sans parler de quelques antiquités), place à l’atelier bricolage pendant lequel nous filons des cadres puis y fixons des plaques de cire gaufrées en y faisant circuler un courant bas voltage.
Jour 5 Dans cette ultime journée il sera question des différentes pathologies auxquelles peuvent être confrontées les colonies. Sur les 29 agents pathogènes qui agressent nos amies, un seul, le varroa, peut être traité avec un médicament. Mais comme le dit Sébastien, on gère le varroa mais on ne peut l’éradiquer. Loque américaine et européenne, mycose, nosémose et fausse teigne finissent de nous refroidir un peu mais nous comprenons également que mieux nous nous occuperons de nos colonies et plus elles auront la capacité d’y résister. Avant de se quitter pour aller mettre en application notre apprentissage nous irons enrucher 2 colonies et disperser les habitantes d’une ruche bourdonneuse.
Une semaine riche en émotions et sensations. La découverte d’une organisation sociale et d’une intelligence collective dont nous avons sûrement à apprendre … mais aussi celle d’un animal aussi mystérieux qu’attirant que Michelet qualifiait de « pontife ailé de l’hymen des fleurs ».
*L’abbé Warré a écrit le traité « L’apiculture pour tous » et a donné son nom à un type de ruche encore appelée « ruche populaire ». Frère Adam a créé une race hybride la Buckfast.
nb : je vous recommande ce livre qui vient de sortir : «Une vie pour les abeilles», un échange entre Henri Clément, apiculteur cévenol et porte parlole de l’Union Nationale de l’apiculture française, et le journaliste Philippe Bertrand.
Photo 1 Copyright Anne-Lore Mesnage 

05 juin 2012

Mettre les mains dans ... le compost

Tel un Clark Kent enfilant son costume de super héros ;-) , JJ & DD se transforme parfois en Super-Compostory en passant son tablier de Maître-Composteur ...

20 mai 2012

Ma bohème californienne à Fairfax la soutenable


Il y a deux ans, pour les vacances d’été, au hasard d'un échange d'appartement je découvre et vis quelques semaines à Fairfax, bourgade de 7 500 habitants située dans la baie de San Fransisco, dans le Marin County : un modèle d’écologie au quotidien.
Article écrit en Aout 2010 - réactualisé en 2012
Ma maire est verte 
En 2003, Fairfax fut la quatrième municipalité dans l’histoire des Etats-unis à basculer dans le « vert » avec une majorité  de représentant du Green Party au conseil municipal dont une femme, Pam Hartwell-Herrero, qui est depuis 2011 le(a) maire de la ville.
Développement à taille humain et respect de l’environnement sont dans les gènes de cette commune paisible rejointe massivement dans les années 60/70 par de nombreux hippies venus de San Fransisco, même si ceux qu’on y croise aujourd’hui sont peu nombreux et ont pris un sacré coup de vieux !  Mais l’esprit est toujours là. La ville interdit par exemple l’implantation de magasins de chaines. Une citoyenne m’a un jour demandé si c’était vrai que Mc Donald’s était maintenant présent en France et à ma réponse positive elle me (nous) conseilla de faire la révolution ! 
La municipalité de Fairfax s’est également battue pour interdire les sacs en plastique dans les commerces locaux, une lutte longue et acharnée car cette décision fut attaquée par le lobby de ses fabricants et fut enfin acquise suite à un référendum en 2009. La Ville s’est également opposée à l’utilisation d’herbicides dans son bassin versant comme à la pulvérisation aérienne de pesticides contre la pyrale de la pomme (LBAM). Pro-active elle a réalisé son bilan carbone dés 2005 et s’est engagée à une réduction de 20 % de ses Gaz à Effet de Serre pour 2050. Elle a aussi fait partie des communes militant pour l’éviction de PG&E (l’EDF local) pour lui préférer sur son territoire Marin Clean Energy un fournisseur local d’énergie renouvelable. Fairfax est également l’une des premières villes du réseau Slowcitta, une déclinaison du Slow Food à l’échelle d’une cité. Enfin à l'été 2011 Fairfax a lancé sa monnaie locale, le Fairbuck (valeur de 3 dollars), acceptée par une trentaine de commerces. La vie démocratique et la concertation y sont fortement développées et la notion de communauté de vie y est importante.
Sustainability Center 
En 1999 deux militantes écologistes locales, Rebekah Collins et Odessa Wolfe, ont créé Sustainable Fairfax, une association d’éducation à l’environnement qui a, depuis 2007, pignon sur rue en face de la Mairie dans la rue principale du village. Ce type de centre pédagogique est encore rare aux Etats-Unis et en tous les cas exceptionnel pour une bourgade de 7 000 âmes ; nos point Info Enérgie font pâle figure en comparaison …
Le Sustainability Center est tout d’abord un lieu de ressources : une bibliothèque (à la mémoire de Rachel Carson – ndlr auteur du Printemps Silencieux récemment réédité en poche) permet d’emprunter différents ouvrages sur l’écologie quand de nombreux prospectus et brochures sur l’éco-responsabilité (eau, agriculture, déchets, énergie, …) sont proposés gratuitement. Dans la cour, à l’arrière du centre, on trouve un jardin pédagogique qui présente différentes techniques de jardinage écologique : compost , récupération d’eau, permaculture, association de plantes, Victory Garden (petits potagers domestiques préconisés par le gouvernement pendant la deuxième guerre mondiale pour être auto-suffisant), …
Mais le Sustainability Center propose également, hors les murs, une multitude d’autres animations pédagogiques : projection de films et documentaires, ateliers (« entretenir sa maison de façon écolo et pas chère » par exemple), conférences et séance de dédicaces, visites de fermes biologiques ou de jardins exemplaire,... L’apothéose annuelle de ce programme a lieu mi juin avec l’Ecofest qui, depuis 2004, propose une projection de film en plein air, des dégustations de vins et bières bio, des stands de nombreuses associations et acteurs de l’économie verte, des concerts et bien évidemment une « parade » haute en couleurs dont sont tant friands les américains.

Bio à tous les étages Fairfax compte un florilège de commerces biologiques. Ah, quel bonheur de ne pas avoir à chercher ou à faire des kilomètres pour trouver un supermarché, un restaurant, un commerce bio ou végétarien : le supermarché alimentaire Good Earth Natural Foods, les glaces Scoop, la bière Iron Springs , l’indien Café Lotus, le végétarien Lydia’s Organics, la boulangerie Fat Angel, même le hamburger ou le hot dog sont bio chez M&G comme les pizzas Mauro, sans oublier l'été le petit marché de petits producteurs. 
Un Scoop glacé et biologique
Le soir et le week-end la file d’attente devant chez Scoop est célèbre à Fairfax. On fait la queue dans la bonne humeur pour déguster une glace artisanale biologique dont le cornet, fait lui aussi maison sous vos yeux, est la cerise sur le gâteau de ce dessert glacé. Lait, fruits et autres ingrédients sont issus de producteurs locaux sont à la base de différents parfums dont les best sellers ont pour nom « Fraise de la baie de Tomales », « Vanille-miel-lavande » ou encore « Canelle-caramel ». On est loin de la multinationale : la boutique fait un mètre de large sur cinq de long et on nous explique que prendre plus de personnel accélérerait peut-être un peu le service mais que la production étant limitée par la taille de la cuisine et le nombre de bacs de présentation (8 : les parfums tournent régulièrement) l’échoppe serait amenée à fermer dans la journée faute de produits à vendre (ce qui arrive néanmoins ponctuellement). 
Marché et supermarchés pour une Bonne Terre 

L’appétance du supermaché Good Earth Natural Foods renvoie l’image de nos supermarchés Biocoop (qui sont pourtant en France les supermarchés bios les plus avancés) à celle des échoppes de l’ére soviétique ! J’ai passé des heures dans ce supermarché à me régaler les yeux et me lécher les babines : il faut reconnaître aux américains un sens certain de la présentation des fruits et légumes. Et le « fait maison » est tout aussi appétissant : bar à salades (les ingrédients changent tous les jours), pains variés, pizzas, jus de fruits et de légumes préparés sous vos yeux, le tout à déguster sous une tonnelle installée devant le magasin. Les fromages sont nombreux et goûteux, le vrac important (la farine n’y est par exemple vendu que dans ce conditionnement), l’étal du boucher (majoritairement du poulet) donnerait des remords à un végétarien fraîchement converti… Ces produits biologiques sont relativement chers mais pas plus qu’en France. Le magasin n’est pas un perdreau de l’année puisqu’il fut le pionnier des magasins bio du Marin County en 1969 ! Même s’il vient de déménager pour s’agrandir, il n’a aucune velléité de devenir une chaîne. Sur le mur extérieur de l’enseigne, une fresque militante, affiche dans un style hippie-kitch-naïf, les valeurs militante de Good Earth (bio, local, sans OGM, …).
Les Farmers Market sont assez répandus en Californie mais celui de Fairfax a la caractéristique de présenter majoritairement des producteurs biologiques du comté. L’étiquette « ground locally » est omniprésente dans la région qui, ne l’oublions pas, est le berceau des locavore. Tout l’été, à l’ombre des pins du Bolinas Park, le mercredi soir, les citoyens de Fairfax viennent bien sûr faire leurs emplettes mais aussi se retrouver. Chacun amène son plaid et va, le temps de quelques heures, dîner sur l’herbe avec le piquenique qu’il a apporté ou un plat acheté aux nombreux traiteurs bio du marché. La communauté partage ainsi un moment de convivialité égayé par des musiciens quand les enfants gambadent dans le parc.
Pinpon, une bière 
Il fait chaud en Californie en ce début d’été. On boirait bien une petite mousse … vous ne mourrez pas de soif car une ambulance vient vous livrer une bière bio, son slogan « Saving lives, one beer at a time ! » (SPB - Société de Protection par la Bière) ! L’Iron Springs est effectivement brassée à Fairfax et le fondateur Mike Altman a transformé une ancienne ambulance en véhicule de livraison en la rebaptisant Am-BREW-lance (jeu de mot : brew = brasser pour ceux qui ne speak pas english) ! Mais ce véhicule est aussi remarquable par son carburant qui n’est autre que l’huile de friture usagée et filtrée du pub du même nom. Les drêches, résidus du brassage, sont par ailleurs utilisées par des fermiers locaux pour nourrir leur bétail.


Oui Fairfax, « The little town that could », petit laboratoire progressiste de la Californie, a un petit goût de paradis pour qui aime vivre bio et écolo au quotidien. Mais néanmoins pas d’angélisme, Fairfax peut encore aller plus loin dans de nombreux domaines à commencer par exemple par celui de la voiture qui reste, même ici, omniprésente et imposante. 

08 février 2012

Amour Vaches

Quand j’étais gamin, j’ai passé certains de mes étés à mener au pré deux fois par jour les vaches de Raoul, fermier de la Bastide, petit hameau du haut Cantal. Ce n’est donc sûrement pas par hasard si Bovines* m’a séduit.

Même si les Charolaises n’ont pas la même couleur que mes Salers, elles en ont la poésie que ce long métrage met en lumière, Et quelles lumières ! Celle de l’orage qui gronde, du soleil du printemps qui frémit, de la brume du matin qui s’évapore.
Macrocosmos
Bovines, c’est tout d’abord le Macrocosmos du ruminant qui les dévisage lentement en gros plans : paître, mastiquer, ruminer. Contrairement aux idées reçues, quelle humanité dans le regard d’une vache ! Et que dire de cette langue - de bœuf sauce gribiche ;-) - qui inlassablement arrache touffe sur touffe. Elle sera tantôt agile au point d’aller secouer un pommier, tantôt douce pour lécher son petit ou goulue pour têter sa maman.
Slow Cow 
Ce film saura t il trouver un public capable de regarder une heure durant des vaches au pâturage, sans intrigue que celle de la nonchalence du quotidien ou du stakhanovisme du broutage ? …Quotidien tout de même ponctué de la mise à bas dans l’herbe du pré d’un veau qu’on a envie de réchauffer tellement il grelotte dans les frimas du matin. Quotidien également troublé des meuglements pour ne pas dire des pleurs des vaches qui voient partir à jamais leurs petits dans la bétaillère... 
Moi aussi je suis vache, j’adore me prélasser dans l’herbe, et comme elles je suis (devenu) végétarien.
*Sortie le 22/2/2012

31 janvier 2012

Et si on écrivait Ordure en deux mots : or dur ? ...

Retrouvez-moi en couverture ;-) et en interview dans le premier tome d'une nouvelle collection intitulée Itinéraire Bis chez Elka Editions. L'une des quatre enquêtes éco-citoyennes de cet opus traite des "Ressources cachées de nos poubelles" et le compostage y est donc évidemment mis à l'honneur. 
Extrait de l'interview du Maître... Composteur.

Itinéraire Bis. On vous présente souvent comme le pionnier du compost collectif en pied d’immeuble à Paris ?
Jean-Jacques Fasquel. C’est effectivement mon fait d’armes (rires). En fait il y a quelques années j’ai changé de paradigme et j’ai revu ma façon de vivre au travers du filtre de la soutenabilité. En commençant par me poser des questions sur mes déchets. Quand certains pensaient à la présidentielle en se rasant moi je pensais au compost en épluchant. Voilà comment j’en suis venu à envisager un projet de compostage collectif dans mon immeuble parisien en 2007. À cette époque les expériences de ce type de projet urbain n’étaient pas légion même si j’ai pu me nourrir notamment du retour d’expérience de Rennes Métropole. 
Et c’est ainsi qu’après une année d’explications et de pédagogie auprès des différentes parties prenantes (bailleur, municipalité, association des locataires, locataires, …) nous nous sommes retrouvés en juin 2008 à une vingtaine de volontaires pour inaugurer notre site de compostage. 

I.B. Vous parlez d’un moment magique ?
J.J.F. Oui la magie a commencé à opérer. J’ai toujours de l’émotion à me remémorer ce moment où des personnes qui ne se connaissaient pas, de tous âges (du minot de 5 ans à Renée notre doyenne de 80 ans), de tous horizons sociaux, se sont réunies pour cette aventure collective partagée pleine de sens.
Cela allait bien au-delà de l’intérêt commun de ces habitants de traiter de façon citoyenne en proximité une partie de leurs déchets. Très vite un bouche à oreille positif s’est développé dans la résidence et 3 ans après nous sommes plus de 70 foyers à composter plus de 7 tonnes de déchets. Et l’histoire a montré que les « Composteurs du 107 » n’allaient pas en rester à ce projet de compostage. 

I.B. Vous dites souvent que le compost rend intelligent et fier. 
J.J.F. Effectivement, intelligent car cela vous amène à une réflexion sur l’écosystème parfait de la nature, sur le traitement actuel des déchets, sur la prévention et les modes de traitement alternatifs, mais aussi sur ce que vous mangez. Si votre bio- seau reste désespérément vide, il y a fort à parier que vous vous nourrissez majoritairement de surgelés, boites de conserves et autres plats préparés… Alors que voir se remplir son bio-seau d’épluchures rend fier, il est synonyme du temps et de l’attention que vous passez à faire vos achats et à la préparation de vos repas et on note que de nombreuses personnes qui compostent achètent plus de produits frais, refont de la cuisine ou passent petit à petit au bio en se disant que non seulement ceci sera meilleur pour leur santé, leur environnement et que le compost produit sera lui aussi de meilleure qualité.
.... la suite de l'entretien à lire dans le premier tome d'Itinéraire Bis